une proposition de François-Michel Pesenti
Théâtre du Point Aveugle - Marseille
création en lien avec Laurent de Richemond (acteur)
une séance avec acteurs proposée par François - Michel Pesenti
sur une musique de Morton Feldman - Piano and Strings - 1h18
avec les acteurs de Purge : Yohei Okuda, Peggy Péneau,
Karine Porciero, Maxime Reverchon, Laurent de Richemond
L’œuvre de Richard Baquié * était là devant moi. Je ne la verrai qu’une seule fois. Une portière de voiture soumise à l’assaut d’une soufflerie mécanique. Sur la vitre, scotché, un petit papier, vibrant au vent, au risque d’être arraché. Quelque chose y est écrit.
On s’approchait, on se penchait pour lire :
« Que reste-t-il de ce qui a été pensé et non dit ? »
Ainsi donc, de tout ce qui a été tu, il reste quelque chose quelque part. Quelque chose qui va se dissoudre ou exsuder. Ou qui va attendre, en l’état, d’être dit, d’être montré ? Ou quelque chose qui va remplir peu à peu la cavité de silence qui cèle son existence, jusqu’à exploser ? Une affaire de gaz en somme, comme quand on est mort. Ou qui va se transformer, sous la pression de ce silence ? En prière peut - être ou en cancer dit - on un peu sans savoir.
Aussi pour moi aujourd’hui cette question : tout ce dont un metteur en scène est le témoin pendant les répétitions, tout ce que les spectateurs donc ne voient jamais, s’abîme - t - il de même dans cette cavité sourde, et y attend ?
Et une autre : serait - il possible, une fois (plusieurs serait l’arnaque d’en faire spectacle) de convoquer des spectateurs à se lier avec un objet - malade, fragile - qui n’aurait pas dû, pour maintes bonnes ou mauvaises raisons, être montré ? Jamais ?
La dernière partie de Purge devait à l’origine durer 1 h 18, le temps de l’exécution intégrale de « Piano and Strings » de Morton Feldman. Je n’ai pas osé (quelque jour on est moins assuré que d’autres). Pourtant les acteurs l’ont inventée cette dernière partie, en répétitions ils l’ont plusieurs fois jouée. J’en ai été le seul spectateur.
Où est-elle aujourd’hui cette dernière partie ? Quels chemins a - t - elle continués dans la disparition qui lui a été imposée. Peut - être est - elle morte d’avoir été coupée. Peut - être est - elle devenue tout à fait autre chose que personne ne soupçonne ?
J’aimerais savoir.
Aussi ai - je proposé aux acteurs d’y retourner voir une seule fois.
Sans répétitions. Cette fois je ne serai pas seul en face d’eux, des autres seront là - vous peut - être - témoins nécessairement brouillants.
Pendant cette séance les acteurs auront pour consigne stricte de ne rien vendre, de ne pas chercher à réussir, de s’en tenir à ce qui arrive. Chaque seconde allant à la perte de la suivante.
Comme dans l’amour.
L’amour ? Vous avez vraiment écrit l’amour ?
Oui, là.
Mais alors vous croyez que le théâtre a quelque chose à voir avec l’acte d’aimer ?
Les metteurs en scène sont sommés d’écrire des textes pour que les spectateurs viennent au théâtre, pas de croire quelque chose.
Vous écrivez des choses auxquelles vous ne croyez pas ? Mais alors il n’y a plus d’art !
Le bar est au fond à gauche.
De fait, pendant cette représentation, le bar restera ouvert, de même les portes du théâtre. Chacun entrera et sortira à son envie. Il n’y aura pas de sièges où s’asseoir. Durée 1 h 18.
François - Michel Pesenti (juillet 2014)
* Richard Baquié : sculpteur français (Marseille 1952-1996)
« La Dernière Chambre »
une performance proposée par François-Michel Pesenti
à partir de la partie dite du territoire de Purge
avec :
Yohei Okuda, Peggy Péneau, Karine Porciero, Maxime Reverchon, Laurent de Richemond
performance crée le 18 octobre 2014
au Théâtre des Bernardines - Marseille
mise en scène, scénographie et costumes : François-Michel Pesenti
musique : Morton Feldman, Piano And String Quartet, 1985, Aki Takahashi (piano) & Kronos Quartet (strings) Elektra Nonesuch
Lumière : Marc Vilarem
Son : Olivier Renouf
Régie Son : Erik Billabert
Vidéo : Rémy Lebreton
crédits photos (diaporama ci-dessus) : © Jean Barak
Production : Théâtre du Point Aveugle
Coproduction : Théâtre des Bernardines